Paul de Gobert

Painting
Paul de Gobert : Les visions métissées d’un voyageur paysagiste Paul de Gobert est un voyageur paysagiste. Il marche, regarde, s’arrête, tire de sa poche son carnet de croquis et dessine, au crayon ou au pastel. Autrement dit, il prend le temps de rendre compte des champs visuels qu’au hasard de ses pérégrinations curieuses, à l’occasion aventureuses, il décide de mémoriser en quelques traits ou aplatissements de pigments colorés. A l’instar du voyageur autour de sa chambre, il peut s’attarder au champ étroitement focalisé de son jardin, s’attachant à croquer sur papier quelques pommes récemment tombées ou cueillies justes à temps, encore éclatantes de leur soudaine maturité, ou bientôt pourrissantes en quelques recoins de son atelier. Mais, lorsque l’occasion se présente, il devient promeneur solitaire, portant son attention sur les variations chromatiques, les différences de vibrations lumineuses, les tracés souples ou abrupts des contrées qu’il parcourt patiemment dans l’attente du prochain arrêt sur dessin. En effet, la qualité première du « naturaliste » est de savoir s’arrêter, non sur l’instantané de la découverte dans le but de son immédiate mise en boîte photographique, mais justement là, à cet endroit où la conjonction de la lumière, de la couleur, du contraste quasiment météorologique que font apparaître les formes soudainement précises du paysage, l’incite à s’asseoir pour fixer, la main levée, la durée à chaque fois différente du plaisir de la perception immédiate, nourrie par l’attention que nécessite le regard englobant autant le proche que le lointain. Ses peintures actuelles, autant que ses carnets de voyages, nous montrent son attention aux différences climatiques, du sec et de l’humide, de l’aride et du marécageux, du rocheux et du mousseux, du bleu éblouissant et de la grisaille métallique, que ses voyages dans le pays brabançon de son adolescence, la Méditerranée de sa jeunesse, l’Atlantique ensuite autant que le Moyen-Orient et l'Asie de son actuelle maturité créatrice, ont successivement exaltés, rassemblant aujourd’hui les différentes impressions exploratoires de son vécu visuel. Mais elles nous démontrent aussi que le peintre naturaliste est devenu pleinement peintre écologiste, refusant les méandres des imageries de la mode "globalisatrice" d’une soi-disant mondialisation unificatrice du regard pour, au contraire, proposer un possible métissage des cultures et des diversités de perception que les différences de conditions hydrographiques imposent aux conditions de vie, ou de survie, des populations qui composent la géographie humaine de notre nouveau millénaire. La politique désire imposer sa volonté de domination et de possession de cette richesse dont seuls les plus cyniques connaissent le prix futur : l’eau. Le peintre, au travers de ses confrontations de témoignages d’images métissées, nous en propose une autre leçon, bien plus généreuse, celle du partage. Michel Baudson Critique d’art, écrivain, membre de l’association internationale des critiques d’art.